Après le déconfinement la consommation reprend lentement et timidement. Dans ce contexte de crise sanitaire et économique, comment redonner confiance aux français, comment relancer les commerces et les petites entreprises ? Les monnaies locales reviennent en force dans les territoires.
Après deux mois de confinement et de repli sur soi, l’urgence en effet pour les élus est de redonner du lien sur leur territoire. Pour répondre aux difficultés économiques liées à la crise sanitaire, la Ville de Capestang et son maire réélu au premier tour, Pierre Polard, ont décidé de soutenir les commerçants, professionnels et producteurs de la commune à travers une initiative originale : la création d’une monnaie d’échange exclusivement locale relate la presse régionale. Originale pas tant que ça, il existe en fait plus d’une cinquantaine de monnaies locales en France et elles sont reconnues comme un outil efficace de redynamisation de l’économie locale. Ce qui est original à Capestang est qu’elle est couplée avec un fonds communal doté de 80 000 euros. La mairie va distribuer la semaine prochaine à chaque foyer des pièces de monnaie pour un montant de 50 euros, des SEL, des jetons qui pourront être dépenser dans les commerces de la ville, dans les restaurants mais également les pharmacies chez l’ostéopathe, le psychologue ou encore les coiffeurs. Les commerçants de Capestang pourront ensuite ou dépenser à leur tour ces jetons ou les changer contre des euros. C’est la meilleure solution dit le maire qu’il a trouvé pour donner à la fois du pouvoir d’achat à ses administrés et aider l’économie locale. Le maire vient en quelques sorte de créer une monnaie hélicoptère locale.
Une monnaie locale peut-elle relancer l’économie ?
En période de crise les monnaies locales sont un excellent vecteur d’entraide et de relance économique à l’échelle d’une commune ou d’une région. Les entreprises fortement touchées par le confinement, sont sans nul doute les TPE, PME, commerçants et artisans. Ils ont vu baisser leur chiffre d’affaires, ils manquent de liquidités, la faillite pour certains n’est pas loin. Par le déploiement de ces monnaies locales, on incite les consommateurs à dépenser leur argent en priorité dans les entreprises locales. Plus il y a d’utilisateurs plus c’est efficace bien sûr.
La plus populaire des monnaies locales de l’Hexagone reste l’eusko, lancé en 2013 dans le Pays basque, avec plus d’un million et demi d’eusko en circulation début 2020, plus de 3 800 adhérents particuliers, et un réseau de plus de 1 000 professionnels.
Au moment où l’on parle beaucoup de chaîne d’approvisionnement et bien la monnaie locale favorise justement les chaînes d’approvisionnement et les circuits courts au sein d’un même territoire. Au Pays Basques, on a constaté par exemple que plus de la moitié des entreprises qui l’utilisent ont changé de fournisseurs pour choisir ceux plus prés de chez eux qui l’utilisent également car les monnaies locales favorisent les réseaux.
Autre avantage des monnaies locales ; elles reposent sur des mécanismes non spéculatifs. Comme elles ne peuvent pas être déposées sur un compte en banque ou thésaurisées, elles ne sont destinées qu’aux échanges, elles circulent donc beaucoup plus vite, 7 fois plus vite qu’une monnaie nationale. En réalisant plus de transactions, vous créez plus de richesse et donc vous contribuez à créer de l’emploi. Et de fait vous redonnez du sens à vos achat
Les monnaies locales trouvent un regain d’intérêt
Les crises sont un terrain fertile pour les monnaies locales. En France, une cinquantaine de nouvelles monnaies locales complémentaires ont été créés depuis les années 2010 après la crise économique. La loi du 31 juillet 2014 relative à l’économie sociale et solidaire a favorisé leur émergence, en reconnaissant leur statut. Elles sont encore jeunes et pour qu’elles se déploient il faut déjà atteindre un seuil suffisant d’utilisateurs pour que cela puisse avoir un véritable impact économique. Il faut savoir que la plus ancienne monnaie locale a été crée en Suisse après la crise de 1929, la Wir est toujours utilisée par plus de 60 000 membres 50 000 PME. Autre exemple, à Bristol au Royaume Uni, le maire de la ville perçoit son salaire en monnaie locale, le Bristol pound qui peut servir également à payer ses impôts et taxes locales. En Bavière, la plus célèbre monnaie locale en Allemagne le chiemgauer avait au plus fort de son développement avait permis de réaliser plus de 7,5 millions et demi de transactions. Le paiement électronique a été institué rendant possible le règlement par virement sa facture d’électricité pour le courant produit par la centrale locale. Des micro crédits en chiemgauer ont même été accordés.
Avec cette crise économique post Covid les monnaies locales sont en train de reprendre de l’intérêt. Parce qu’il faut aider les petites entreprises, les commerçants, l’environnement, c’est un outil puissant pour retisser du lien et de la confiance et c’est également selon l’Ademe , l’agence de l’environnement et la maîtrise d’énergie, un bon levier pour la transition écologique. Ces monnaies locales sont en général adossées à des banques coopératives de financement éthique comme la Nef, elles alimentent des fonds de réserves qui peuvent servir à des projets écologiques. Les citoyens doivent comprendre que la monnaie c’est le pouvoir : pour celui qui la crée et celui qui la contrôle. Elles n’ont pas aujourd’hui l’ambition de remplacer l’euro mais elles servent plus assurément à l’économie réelle sans risque d’évaporation. Avec une monnaie locale vous savez où va votre argent, où il circule et le type d’activité qu’il finance.
https://www.franceculture.fr/emissions/le-billet-economique/la-chronique-eco-du-mercredi-27-mai-2020